MSP/CPTS : le gouvernement précise…

 Le gouvernement a apporté différentes précisions relatives aux CPTS et MSP dans le cadre de l’habilitation donnée par l’article 64 de la loi n°2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé. 

De manière générale ce texte conforte ces deux structures (CPTS et MSP) en tant qu’acteurs indispensables du paysage sanitaire libéral dans l’objectif de favoriser le développement de l’exercice coordonné sur les territoires. 

L’ordonnance confirme tout d’abord le choix de la forme associative comme structure de référence pour les CPTS[1] ; il est donné un délai d’un an aux structures constituées sous une autre forme juridique pour se mettre en conformité.

Le texte prévoit ensuite la possibilité pour les CPTS de conclure des conventions avec l’ARS et la CPAM[2] (dont le cadre sera précisé par décret en Conseil d’Etat) en vue d’assurer, en tout ou partie, une ou plusieurs missions de service public parmi les items suivants :

  • Amélioration de l’accès aux soins ;
  • Organisation de parcours de soins associant plusieurs professionnels de santé ;
  • Développement d’actions territoriales de prévention ;
  • Développement de la qualité et de la pertinence des soins ;
  • Accompagnement des professionnels de santé sur leur territoire ;
  • Participation à la réponse aux crises sanitaires.

La contractualisation sur ces items permet de bénéficier d’aides spécifiques de l’Etat ou de la CPAM et de certaines exonérations fiscales (exonération IS et CFE)[3] afin de compenser la charge des missions de service public réalisées.

Le Gouvernement consacre le principe de l’exonération fiscale des financements obtenus dans le cadre de la réalisation de ces missions de service public.

Toutefois, le texte renvoie à un décret ultérieur la fixation des règles et modalités de fonctionnement des CPTS notamment quant aux conditions de versement d’indemnités ou de rémunérations au profit de leurs membres ainsi que leur montant annuel maximum. Cette disposition a toutefois pour avantage de montrer que le gouvernement souhaite se saisir de la question de la répartition, entre ses membres, des fonds alloués aux CPTS. Il serait également opportun que le texte précise les modalités d’imposition des sommes distribuées aux membres de l’association.

Dans cette attente, il conviendra pour les CPTS désireuses de rétribuer leurs membres pour des missions de service public de mettre en place des procédures d’attribution de rémunérations transparentes et de pouvoir en justifier (Règlement intérieur, Décision d’un organe délibérant prises dans les formes prévues par les statuts, contrôle de la réalisation des missions, etc).


[1] Article L. 1434-12-1 du CSP
[2] Article L. 1434-12-2 du CSP
[3] Article 207 1° et 1461 A du CGI

Le texte apporte d’importantes nouveautés quant à l’exercice au sein des sociétés interprofessionnelles de soins ambulatoires concernant la possibilité d’avoir recours au salariat, à l’évolution des modes de répartition des honoraires entre les associés des structures, à la pérennisation des SISA et à l’emploi d’assistants médicaux.

L’autorisation de recours au salariat au sein des SISA

Il prévoit notamment la possibilité pour ces structures d’avoir recours au salariat pour les activités de soins de premier et de second recours, ainsi que pour d’autres activités contribuant à la mise en œuvre du projet de santé[1]. Cette possibilité devra être expressément prévue par les statuts de la SISA.

Les structures qui souhaitent salarier des professionnels de santé devront faire l’objet d’une inscription auprès des ordres concernés[2].

Le nombre des professionnels de santé pouvant être salariés au sein de la structure doit nécessairement être inférieur au nombre des professionnels de santé libéraux associés[3].

Les médecins salariés de la structure pourront par ailleurs être nommés comme médecins traitants[4].

Cette disposition a pour objet de répondre aux besoins des zones connaissant des difficultés de démographie médicale et de répondre aux attentes de certaines catégories de médecins (jeunes diplômés, retraités souhaitant poursuivre leur exercice).

La possibilité de recourir aux assistants médicaux

Jusqu’alors impossible, le concours des assistants médicaux aux médecins des SISA est rendu possible par cette ordonnance. Ces derniers constituent un appui fondamental pour les médecins en ce qu’ils permettent de libérer, de manière importante, du temps médical.

La SISA pourra constituer un groupement d’employeurs permettant de mettre à disposition des assistants médicaux au service des médecins.

L’évolution des modes de répartition des rémunérations au sein des SISA

Afin de faciliter la pluriprofessionnalité et les prises en charge globales, le Rapport au Président de la République sur l’ordonnance précise que la SISA pourra percevoir des subventions forfaitaires à charge pour elle d’en assurer la redistribution à chaque intervenant concerné.

Toutefois le texte même de l’ordonnance semble aller plus loin en prévoyant : « l’encaissement sur le compte de la société de tout ou partie des rémunérations des activités de ses membres ou de celles de tout autre professionnel concourant à la mise en œuvre du projet de santé et le reversement de rémunérations à chacun d’eux ». Cette rédaction ouvre la voie à la possibilité d’un véritable partage d’honoraires pluriprofessionnel.

Il conviendra d’être attentif aux précisions données par les institutions (CPAM, Ordres professionnels, etc.) quant à cette possibilité et à sa réalisation technique dans la mesure où jusqu’à ce jour les SISA ne pouvaient percevoir que des rémunérations forfaitaires.

Disposition relative à la pérennisation des SISA

Certaines structures se sont vues confrontées à la difficulté de maintenir la composition minimale des SISA, à savoir deux médecins et un paramédical. Pour favoriser la pérennisation des MSP notamment en zones sous-denses, le délai permettant au juge de prononcer la dissolution de la structure qui ne remplit pas les conditions de composition, est porté de 6 mois à 18 mois dans le cas où, dans l’intervalle, un salarié a pu être recruté en remplacement du professionnel manquant.

Il convient de noter que la création de ces structures demeure subordonnée à la présence initiale de deux médecins et d’un paramédical ce qui peut être un frein à leur constitution dans les territoires les moins bien dotés démographiquement.


[1] Article L. 4041-2 3° du CSP
[2] Rapport au Président de la République relatif à l’ordonnance n°2021-584 du 12 mai 2021 relative aux communautés professionnelles territoriales de santé et aux maisons de santé
[3] Article L. 4041-4 5° du CSP
[4] Article L. 162-5-3 du Code de la sécurité sociale

Le gouvernement poursuit ainsi, par ce texte, la structuration de la médecine libérale autour des MSP et des CPTS en offrant d’importantes opportunités dérogatoires à la pratique libérale classique (partage des honoraires, possibilité de recourir au salariat, etc.).

Il manifeste que les gouvernements successifs font de l’exercice coordonné le socle de la médecine libérale de demain. Aussi, il est indispensable pour les professionnels de santé de saisir ces opportunités et de les adapter à leurs pratiques.

L’enjeu est ici, non pas d’offrir un cadre unique mais au contraire d’encourager les professionnels libéraux à constituer des structures réactives et capables de s’adapter aux difficultés propres de leurs territoires.

Il est toutefois regrettable que le texte n’ait pas précisé le régime et les modalités de versement des indemnités et de rémunérations par la CPTS au profit de ses membres. Il reste à espérer que la clarification par décret interviendra à bref délai.

Rédaction : Me J-M Le Gallo